Le 9 avril dernier, le journaliste Alfousseini Togo, directeur de publication du journal Canard de la Venise, a été placé sous mandat de dépôt à Bamako.
En cause, un article publié la veille, titré « La bourde du ministre Mamoudou Kassogué », dans lequel il remet en question les chiffres avancés par le ministre de la Justice au sujet de la confiance des citoyens dans l’institution judiciaire. Il devra comparaître le 12 juin prochain devant la justice.

Dans ce texte, Togo s’interroge sur les propos du ministre qui affirmait que la confiance des Maliens dans leur justice était passée de 30 à 72 % en 2024. Il qualifie ce chiffre d’invérifiable et brosse un portrait sombre du système judiciaire malien, qu’il juge corrompu et instrumentalisé, en particulier en période de transition. Il s’en prend aussi directement au pôle judiciaire anti-cybercriminalité, l’accusant de rendre des décisions biaisées sous influence politique.
Un climat judiciaire de plus en plus tendu
Les accusations retenues contre le journaliste, atteinte au crédit de l’État, injures et diffamation ont rapidement suscité la réaction de ses confrères. En effet, l’Union nationale des jeunes éditeurs de presse du Mali (Unajep) a déploré son incarcération, affirmant qu’il est poursuivi uniquement pour ses opinions. Son président, Albadia Dicko, qui a pu lui rendre visite en prison, assure que Togo garde un bon moral.
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Cependant, de nombreuses voix s’élèvent contre ce qu’elles perçoivent comme une atteinte à la liberté d’expression. En effet, la Maison de la presse, qui fédère les associations de journalistes du pays, s’inquiète du rôle croissant du pôle anti-cybercriminalité dans les affaires impliquant les médias. Pour l’organisation Reporters sans frontières, cette détention est abusive. Elle dénonce des poursuites floues et démesurées, et appelle à la libération immédiate du journaliste.
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Dans un contexte où plusieurs figures de la société civile et des médias ont été réduites au silence, l’affaire Togo devient emblématique d’une tendance lourde : celle d’une justice perçue comme répressive envers les voix critiques. Une conférence de presse est prévue ce vendredi à Bamako pour réclamer sa libération.