Dans les rues de cette métropole de plus de 20 millions d’habitants, une dizaine de graffeurs, armés de pinceaux et de bombes de peinture, s’affairent à donner vie aux fresques qui constituent le cœur de cet évènement.
Sur la grande artère qui longe Victoria Island, l’un des quartiers les plus huppés de Lagos, le vacarme constant des klaxons et les vapeurs des véhicules n’altèrent en rien la concentration des artistes. Une dizaine de graffeurs, armés de pinceaux et de bombes de peinture, s’affairent à donner vie aux fresques qui constituent le cœur du tout premier festival de street art de la ville, une métropole de plus de 20 millions d’habitants où la discipline reste encore marginale.

Une mégapole artistique, mais un street art encore discret
Malgré son effervescence culturelle, ses galeries reconnues et son rôle majeur dans l’art contemporain africain, Lagos n’a pas encore intégré pleinement l’art mural dans son paysage urbain, contrairement au Cap, à Dakar ou à Cotonou. Le thème du festival, «Lagos, ville légendaire, ville des rêves», laisse volontairement de côté les difficultés économiques et sécuritaires du pays. Il met plutôt en avant l’énergie de la ville et la résilience de ses habitants, une attitude résumée jadis par le musicien Fela Kuti : «souffrir et sourire».

«À Lagos, on reste joyeux malgré tout»
Pour Ashaolu Oluwafemi, 34 ans, qui peint une femme dansant, les yeux clos et les bras levés, la ville est avant tout un lieu où l’on continue de célébrer la vie, même dans les moments difficiles. Une vision partagée par Babalola Oluwafemi, artiste nigérian installé à Manchester, invité pour l’événement. Devant son immense portrait de femme accompagné d’un paon, symbole de fierté et de beauté, il raconte que «les habitants de Lagos aiment la fête, les couleurs, l’excès. Ils savent profiter de chaque instant».

Une insécurité persistante mais un moral intact
Alors que le pays fait face à une recrudescence d’enlèvements massifs dans le Nord et que le président nigérian a récemment déclaré l’état d’urgence, Lagos se prépare néanmoins à son célèbre «Detty December». Cette période festive, prisée par la diaspora, transforme la ville en un immense terrain de célébration malgré les tensions qui secouent le pays.
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Une ville transformée par la couleur
Perché sur son échafaudage, l’artiste mancunien décrit son expérience : «Je n’avais jamais peint dans des conditions pareilles. La foule, la circulation, les encouragements… c’est unique !». Les longs murs ternis par la pollution, séparant la voie rapide des résidences 1004, de vieux immeubles construits dans les années 1970, se couvrent désormais de teintes éclatantes. Ernest Ibe, 35 ans, regrette cependant le manque de reconnaissance du street art au Nigeria par rapport à d’autres pays du continent, tout en saluant une évolution positive : «Nous commençons à mesurer l’impact social des fresques et leur pouvoir sur notre environnement.»
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L’ascension du street art nigérian
Son œuvre intitulée Illumination montre une jeune fille portant un flambeau, tournée vers l’avenir. «Elle avance grâce à ceux qui ont ouvert la voie avant elle», explique-t-il, confiant dans le futur du street art au Nigeria, particulièrement à Lagos. Ce renouveau est précisément ce que souhaite encourager Osa Okunkpolor, plus connu sous le nom d’Osa Seven, figure majeure du graffiti nigérian et initiateur du festival. Son ambition : offrir une plateforme aux artistes émergents et positionner Lagos sur la carte internationale du street art. «L’art ne doit pas rester enfermé dans les galeries. Il doit être accessible à tous», affirme-t-il.
Notre Afrik avec AFP







