Ce mercredi 12 novembre, une crise ouverte a éclaté autour du contrôle de la coalition présidentielle, révélant des fractures profondes au sein du pouvoir issu des urnes en mars 2024.
En toile de fond, la destitution controversée d’Aïssatou Mbodj, figure clé de l’alliance ayant porté Diomaye Faye à la présidence. En effet la cohabitation politique entre le président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko traverse une nouvelle zone de turbulence.
Dans un communiqué rendu public mardi soir, le chef de l’État a annoncé la fin des fonctions d’Aïssatou Mbodj à la tête de la coalition, évoquant des «facteurs de division». Elle est remplacée par Aminata Touré, ancienne Première ministre. Une décision que le parti Pastef, formation d’Ousmane Sonko, rejette catégoriquement : «Le président Faye n’a pas le pouvoir de démettre Mme Mbodj», martèle le bureau politique. «Pastef et ses alliés ne se reconnaissent dans aucune initiative coordonnée par Mme Touré.» Cette réaction souligne la fracture institutionnelle entre les deux hommes forts du pouvoir sénégalais, dont l’alliance reposait jusqu’ici sur une loyauté politique forgée dans la lutte contre l’ancien régime.

Une rivalité au sommet du pouvoir
L’épisode de la révocation d’Aïssatou Mbodj n’est que le dernier rebondissement d’un bras de fer larvé. Déjà en juillet 2025, Ousmane Sonko avait publiquement reproché au président Faye son «manque d’autorité». Et samedi dernier, lors d’un meeting géant à Dakar, le Premier ministre a réaffirmé son soutien indéfectible à Mbodj, balayant toute tentative de changement à la tête de la coalition. Cette démonstration de force, saluée par une foule enthousiaste, illustre la popularité intacte du leader de Pastef, près de deux ans après son exclusion de la présidentielle, une élection qu’il avait confiée à Diomaye Faye après l’invalidation de sa propre candidature.
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Depuis, les lignes d’alliance se sont brouillées. Le Sénégal vit une situation inédite : un président redevable de son élection à un Premier ministre qui demeure, pour beaucoup, le véritable chef du camp au pouvoir. Dans ce climat tendu, Ousmane Sonko a décidé de prendre un congé à durée indéterminée, officiellement pour «réorganisation politique». Son intérim à la Primature est assuré par la ministre de la Justice Yassine Fall. Mais cette absence, en pleine crise politique, alimente les spéculations sur une possible rupture entre les deux anciens compagnons de lutte.
Une coalition fragilisée et des ambitions recomposées
La Coalition Diomaye Président, autrefois vitrine de l’unité des réformateurs, semble désormais vaciller. Selon plusieurs sources, la décision présidentielle de nommer Aminata Touré visait à «redonner un souffle» à une alliance paralysée par les rivalités internes. En deux mois, les tentatives de relance menées par Aïssatou Mbodj n’ont pas suffi à apaiser les divisions. Pourtant, Pastef continue de miser sur elle pour piloter un nouveau projet politique baptisé Coalition APTE, censé élargir la base militante et préparer les prochaines échéances électorales.
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De son côté, le président Diomaye Faye défend sa décision comme une nécessité de clarification : «L’unité du mouvement présidentiel ne saurait se construire sur la confusion et la rivalité», a-t-il confié à son entourage. Mais pour Sonko et ses partisans, ce remplacement marque une tentative d’affaiblir leur influence au sein du pouvoir.
La fracture Diomaye–Sonko symbolise aujourd’hui les limites d’une alliance née dans la contestation. Leur tandem, longtemps perçu comme l’incarnation du renouveau politique sénégalais, vacille sous le poids des ambitions, des divergences stratégiques et d’une gouvernance à deux têtes difficilement tenable.







