Côte d’Ivoire : la réparation redonne espoir aux femmes victimes d’excision

Côte d'Ivoire : la réparation redonne espoir aux femmes victimes d'excision

Au total, 28 femmes ivoiriennes ont bénéficié d’interventions de chirurgie réparatrice dans un hôpital public situé à Treichville, en périphérie sud d’Abidjan.

Tête haute et sourire confiant, Adèle Koue Sungbeu foule d’un pas assuré le chemin qui mène à son lieu de travail, non loin d’Abidjan. À 45 ans, cette sage-femme ivoirienne affirme avoir retrouvé une part d’elle-même longtemps perdue. Mutilée à l’adolescence, elle vient tout juste de bénéficier d’une intervention de chirurgie réparatrice.

Côte d'Ivoire : la réparation redonne espoir aux femmes victimes d'excision

Une intervention attendue depuis des années

Adèle fait partie des 28 femmes ivoiriennes qui ont reçu, en avril 2025, des soins de reconstruction génitale au sein d’un hôpital public de Treichville, dans la banlieue sud de la capitale économique. Cette initiative s’inscrivait dans le cadre d’une mission humanitaire menée par le Fonds Muskoka, un programme mis en place en 2010 à l’initiative de la France lors d’un sommet du G8.

La chirurgienne française Sarah Abramowicz, spécialiste reconnue de la réparation des mutilations génitales féminines, a dirigé les interventions avec son équipe, composée d’un assistant et d’un anesthésiste. Malgré des conditions de travail rudimentaires et une chaleur accablante, le trio médical a procédé à la reconstruction du clitoris et des petites lèvres d’Adèle, venue accompagnée de proches.

Un fardeau intime devenu silence pesant

Adèle, mère de trois garçons, partage son histoire avec franchise. En instance de divorce, elle explique que si l’excision ne lui causait pas de douleurs physiques particulières, c’était le regard silencieux de ses partenaires qui la faisait souffrir. « Je ressentais du plaisir, mais je voyais bien qu’ils n’étaient pas à l’aise. Ils ne disaient rien, mais moi je le sentais. Et ça me rendait mal à l’aise aussi. Quand tu compares avec d’autres femmes, tu vois que tu es différente », confie Adèle.

📣 Ne manquez plus rien de l’actualité africaine en direct sur notre chaîne WHATSAPP

Elle cherchait depuis longtemps une solution, mais ne savait vers qui se tourner. « C’est une chirurgie délicate, il faut que ce soit bien fait. Alors quand j’ai appris que des médecins français venaient, j’ai sauté sur l’occasion », raconte-t-elle. Quelques heures après son opération, elle affirme être fière de son choix, même si elle n’a pas encore vu le résultat final.

Des femmes en quête de réparation

Dans la même salle d’attente, une autre patiente de 31 ans attend son tour. Excisée à l’âge de six ans par une matrone, elle confie avoir tenté une réparation au Burkina Faso, sans succès, malgré les 370 000 francs CFA (environ 565 euros) dépensés. « Ça me gêne dans mes rapports intimes. Mon mari est parti à cause de ça », affirme la patiente qui espère que cette fois-ci, elle pourra enfin tourner la page.

Lire: Gambie : Les députés optent pour l’interdiction de l’excision

Au-delà des interventions gratuites offertes aux femmes, cette mission avait aussi un objectif pédagogique de former localement. Dix chirurgiens venus de six pays francophones d’Afrique de l’Ouest et du Centre (Guinée, Bénin, Sénégal, Tchad, Togo, Côte d’Ivoire) ont été initiés aux techniques de réparation par la Dre Abramowicz. Sept sages-femmes et professionnels paramédicaux ont également été formés pour assurer un suivi psychosocial global. « Une réparation réussie, c’est une prise en charge complète : sur le plan médical, mais aussi psychologique et social », insiste la spécialiste française, l’une des rares à pratiquer cette chirurgie en France.

Stéphanie Nadal Gueye, coordinatrice du Fonds Muskoka, souligne l’importance de rendre ces soins accessibles à toutes. « Il ne faut pas que seules celles qui peuvent payer un médecin privé y aient droit. Ces opérations doivent pouvoir être réalisées dans les hôpitaux publics », explique Stéphanie Nadal Gueye.

Notre Afrik avec AFP

Abonnez vous à notre newsletter

Articles similaires

Get the app