Systèmes alimentaires : deux scientifiques africaines honorées pour leurs innovations

Systèmes alimentaires : deux scientifiques africaines honorées pour leurs innovations

La Nigériane Dr Mercy Diebiru-Ojo, experte en culture du manioc, et la Kényane Professeure Mary Abukutsa Onyango, spécialiste des légumes traditionnels africains, ont été honorées par le Prix africain de l’alimentation 2025.

Le Prix africain de l’alimentation 2025 a été décerné le mercredi 3 septembre au Dr Mercy Diebiru-Ojo, experte nigériane en culture du manioc, et à la professeure Mary Abukutsa Onyango, horticultrice kényane spécialisée dans les légumes indigènes africains. La cérémonie de remise du prix s’est déroulée à Diamniadio, en marge du Forum africain sur les systèmes alimentaires, en présence de décideurs politiques, de chercheurs et de représentants du secteur privé.

Doté d’une enveloppe de 100 000 dollars, ce prix vise à reconnaître les contributions majeures à l’amélioration de la sécurité alimentaire, de la nutrition, de la résilience climatique et de l’autonomisation des communautés rurales à travers le continent. Les deux lauréates incarnent des approches novatrices et ancrées dans les réalités locales, en phase avec les défis actuels de l’agriculture africaine.

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Moderniser la filière manioc et igname au Nigeria

Chercheuse et entrepreneure, le Dr Diebiru-Ojo s’est illustrée par son engagement dans la réforme des systèmes semenciers du manioc et de l’igname. À travers son entreprise GoSeed Ltd, elle a introduit au Nigeria la technologie SAH (hydroponie semi-autotrophique), qui permet une multiplication rapide de semences saines et performantes. « Les agriculteurs peuvent désormais accéder à des variétés adaptées à différents marchés, avec des rendements doublés et une meilleure valorisation », a-t-elle expliqué.

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Grâce à cette innovation, le délai de diffusion de nouvelles variétés a été réduit de dix à moins de trois ans, renforçant les liens entre la recherche, les agriculteurs et l’agro-industrie. Pour la chercheuse, ce prix est une reconnaissance, mais aussi un appel à intensifier les efforts pour démocratiser l’accès aux semences de qualité.

Redonner leur place aux légumes africains oubliés

Professeure à l’université Jomo Kenyatta au Kenya, Mary Abukutsa Onyango consacre sa carrière, depuis plus de 30 ans, à la promotion des légumes traditionnels africains, longtemps marginalisés dans les politiques agricoles. Ayant souffert d’allergies alimentaires dans son enfance, elle a personnellement expérimenté les bienfaits nutritionnels de ces aliments. « Lorsqu’en 1992 j’ai lancé mes recherches, ces légumes étaient perçus comme des aliments de pauvres. Mon but était de les repositionner comme essentiels à la santé et à la sécurité alimentaire », a-t-elle confié.

Elle a dirigé plus de 20 projets de recherche, travaillé sur la conservation, la documentation des savoirs traditionnels, l’analyse des marchés, et enregistré neuf variétés locales auprès des autorités kényanes. Ses travaux ont permis une hausse de 200 % de la production entre 2010 et 2025, avec des débouchés commerciaux au Kenya et à l’international, notamment aux États-Unis. « Le malum, par exemple, contient vingt fois plus de fer que le chou. Il est temps d’intégrer ces légumes dans les programmes scolaires, les politiques publiques et les chaînes de valeur », a-t-elle souligné.

Lire : Afrique : environ 868 millions de personnes vivaient en situation d’insécurité alimentaire en 2022 selon la FAO

Un engagement pour la souveraineté alimentaire africaine

La professeure Mary Abukutsa Onyango plaide pour la mise en place de centres de ressources sur les légumes indigènes, afin de préserver les connaissances, de faciliter l’innovation technologique et de renforcer les capacités des producteurs locaux. Le comité du Prix, présidé par le Dr Jakaya Mrisho Kikwete, ancien président de la Tanzanie, a salué l’impact transformateur des deux lauréates, qu’il considère comme un modèle de développement fondé sur l’innovation locale, la valorisation des cultures négligées et un ancrage communautaire fort.

Des femmes au cœur de la transformation agroalimentaire

Le Dr Wanjiru Kamau Rutenberg, membre du comité, a mis en lumière l’influence des deux lauréates sur les pratiques agricoles et alimentaires du continent. « Leurs initiatives redéfinissent la manière dont l’Afrique cultive, achète et consomme ses aliments. Les systèmes semenciers développés par le Dr Diebiru-Ojo offrent aux agriculteurs un nouveau départ à chaque saison, tandis que le travail de la professeure Abukutsa Onyango améliore la nutrition et les revenus des producteurs », a-t-il déclaré.

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