Le 24 novembre, une étoile de la musique reggae s’est éteinte. En Afrique, il fut l’un des premiers à défendre ce genre musical, ouvrant la voie à des générations d’artistes.
Il a fait vibrer la planète entière avec «Reggae Night» et prouvé que la joie pouvait se chanter avec «Hakuna Matata». Jimmy Cliff n’a pas seulement popularisé le reggae, il en a façonné l’âme, montrant au monde qu’un rythme pouvait aussi porter des messages sociaux et politiques. En Afrique, il fut l’un des premiers à défendre ce genre musical, ouvrant la voie à des générations d’artistes.
La disparition d’une légende
Le 24 novembre, Jimmy Cliff s’est éteint à 81 ans, victime d’une crise d’épilepsie et d’une pneumonie, a annoncé son épouse. Monument de la musique jamaïcaine, il avait, bien avant Bob Marley, propulsé le reggae sur la scène internationale. Ses premiers succès, Many Rivers to Cross (1969) et The Harder They Come (1972), avaient fait de lui la première star mondiale du genre — renforcé par son rôle emblématique dans le film du même nom.

C’est Jimmy Cliff qui a permis à un jeune Bob Marley d’enregistrer ses premiers titres solo. En le présentant au producteur Leslie Kong, il a involontairement contribué à façonner celui qui deviendrait l’icône absolue du reggae. Une réussite qui lui laissa, des années plus tard, un certain goût amer, comme il le confiait lors de la promotion de son album Rebirth, qui lui valut un second Grammy Award.
Des racines modestes, un destin hors norme
Né en 1944 dans une Jamaïque encore coloniale, James Chambers grandit dans une famille nombreuse avant d’être envoyé très jeune à Kingston. Là, il se forge une oreille musicale entre église, radio et rues vibrantes de ska. Son premier disque, sorti en 1962, annonce déjà la naissance d’un talent. C’est aussi à cette époque qu’il recommande à son producteur un autre jeune chanteur : Bob Marley. À la fin des années 1960, Jimmy Cliff conquiert le Brésil puis le public américain grâce à Vietnam, chanson devenue hymne des mouvements opposés à la guerre. Sa notoriété explose au cinéma avec The Harder They Come, film culte dont il compose une partie de la bande originale.
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Séduit par l’Afrique, Jimmy Cliff en devient l’un des principaux ambassadeurs du reggae. En 1977, il entreprend une tournée mémorable au Sénégal, en Gambie ou encore en Sierra Leone, embarquant des musiciens locaux – dont le Malien Cheick Tidiane Seck. Sa conversion à l’islam, qui le conduit un temps à se faire appeler Naïm Bachir, marque une étape de plus dans un parcours spirituel complexe.
Son œuvre concilie puissance vocale et engagement. Ses chansons dénoncent les injustices, comme Remake the World, censurée en Afrique du Sud pour ses paroles jugées subversives. Paradoxalement, il y est autorisé à se produire en 1980, donnant un concert marquant à Soweto devant 20 000 personnes. Son album Give The People What They Want, avec le titre Majority Rule, prolonge ce combat.
Une présence ancrée en Afrique
Jimmy Cliff a sillonné le continent durant des décennies : Ghana, Zaïre, Zambie, Maroc, Madagascar, Algérie… En 2015, il enflamme encore la Côte d’Ivoire au festival Abireggae. Sa relation avec l’Afrique est intime ; il y possède un terrain au Liberia et s’y rend régulièrement dans le cadre de sa quête identitaire.
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Quarante albums, quatre Grammy Awards, une entrée au Rock & Roll Hall of Fame : Jimmy Cliff laisse un patrimoine musical colossal. Son influence traverse les frontières et inspire des artistes tels que le Sud-Africain Lucky Dube. Ses chansons ont été reprises à travers tout le continent africain, notamment par des groupes cap-verdiens ou sud-africains. Et avec Hakuna Matata, immortalisée en 1994 dans Le Roi Lion, sa voix est devenue l’un des sons les plus familiers à travers le monde, un symbole de joie, de liberté et d’Afrique.







