Après la décision du tribunal de Bangui, rendue à la mi-octobre, lui retirant sa nationalité centrafricaine, l’ancien Premier ministre Anicet-Georges Dologuélé a officiellement saisi, mercredi dernier, le Comité des droits de l’Homme des Nations unies à Genève.
L’objectif est de contester une décision qu’il qualifie de «profondément injuste» et d’«atteinte à ses droits fondamentaux». Cette déchéance, survenue à peine une semaine après le dépôt de sa candidature pour la présidentielle du 28 décembre 2025, bouleverse le paysage politique centrafricain. Dologuélé, arrivé deuxième à la présidentielle de 2020 face à Faustin-Archange Touadéra, estime que cette mesure n’est pas seulement une sanction administrative, mais une tentative d’exclusion politique. «On ne peut pas rendre quelqu’un apatride», a-t-il déclaré à l’AFP, soulignant que cette décision revenait à lui nier son appartenance à la nation qu’il a servie.
Une bataille juridique à portée politique
Le tribunal de Bangui s’était appuyé sur l’article du code de la nationalité de 1961, qui stipule que tout Centrafricain acquérant une nationalité étrangère perd automatiquement la sienne. Or, Dologuélé avait acquis la nationalité française en 1994. En août dernier, il y a pourtant renoncé publiquement afin de se conformer à la Constitution révisée en 2023, laquelle interdit désormais aux binationaux de briguer la magistrature suprême. Selon ses proches, sa renonciation devait suffire à rétablir pleinement sa citoyenneté centrafricaine. La justice, elle, en a décidé autrement.

Pour Me Robin Binsard, avocat de Dologuélé, la procédure engagée à l’ONU vise à «faire reconnaître le caractère politique» de cette décision. «Le pouvoir en place tente de confisquer la démocratie. Nous utiliserons toutes les voies de droit pour mettre fin à cette dérive autoritaire», a-t-il déclaré à l’AFP. De son côté, le plaignant affirme vouloir «défendre la valeur de la citoyenneté centrafricaine » et « rappeler que nul ne peut être privé arbitrairement de ses droits civils et politiques».
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La plainte déposée à Genève pourrait marquer un tournant. Même si les décisions du Comité des droits de l’Homme n’ont pas de force contraignante, leur portée symbolique est considérable. En portant le débat au niveau international, Dologuélé met en lumière les tensions entre justice, pouvoir politique et démocratie en Centrafrique.
Dans un contexte électoral déjà tendu, cette affaire pourrait peser lourdement sur la crédibilité du scrutin à venir. Le Conseil constitutionnel a jusqu’au 16 novembre pour valider la liste définitive des candidats. Si le recours de Dologuélé aboutit, il pourrait être réintégré dans la course présidentielle. Dans le cas contraire, il risquerait d’être définitivement écarté du jeu politique.
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Pour beaucoup d’observateurs, cette crise illustre la fragilité des institutions nationales et la difficulté de concilier droit et politique dans un pays en quête de stabilité. À mesure que le 28 décembre approche, la question dépasse la seule personne de Dologuélé : elle interroge la conception même de la citoyenneté, de la souveraineté et de la démocratie en République centrafricaine.
Notre Afrik avec AFP







