Athlétisme : le prix à payer pour les athlètes kényans entre décès, dépression et dopage

Ces dernières années, plusieurs drames ont révélé les nombreux défis auxquels ces sportifs sont confrontés.

À l’échelle mondiale, les athlètes kényans sont réputés pour leur domination sur les épreuves de fond et de demi-fond. Cependant, derrière leurs victoires, se cachent des défis personnels et des souffrances silencieuses, exacerbées par des problèmes de santé mentale et des scandales de dopage. Ces dernières années, plusieurs tragédies ont mis en lumière les difficultés auxquelles sont confrontés ces sportifs, notamment les décès récents de figures emblématiques.

Beatrice Chebet et Faith Kipyegon aux JO de Paris 2024

Pour de nombreux athlètes kényans, la compétition ne se limite pas à l’obtention de médailles. C’est souvent une question de survie. Gagner est une nécessité non seulement pour leur propre bien-être, mais aussi pour assurer la subsistance de leurs familles. Cette pression constante pousse certains vers des comportements autodestructeurs, incluant le dopage, les addictions, et parfois la violence. Le cas de Kipyegon Bett, un coureur prometteur, illustre tragiquement cette spirale infernale.

Dopage et dépression, le lourd fardeau des suspensions

Depuis 2017, plus de 80 athlètes kényans ont été sanctionnés pour dopage, selon l’Unité d’intégrité de l’athlétisme mondial. Une fois suspendus, ces sportifs doivent faire face à une chute brutale de leurs revenus, engendrant des difficultés financières et des problèmes de santé mentale. Kipyegon Bett, médaillé de bronze aux Championnats du monde de 2017, a été suspendu en 2018 après avoir été contrôlé positif à l’EPO. Sa suspension de quatre ans a plongé l’athlète dans la dépression et les addictions. Le 6 octobre 2024, l’athlète est décédé à l’âge de 26 ans des suites d’une insuffisance rénale et hépatique liée à l’alcool.

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Sa sœur, Purity Kirui, a révélé qu’il avait ignoré les appels de sa famille à reprendre l’entraînement après sa suspension. « Il est entré en dépression et a commencé à boire beaucoup », a-t-elle déclaré. La mort de Kipyegon Bett a été suivie de celle du coureur de steeple Clement Kemboi, retrouvé mort le même jour à Iten, un centre d’entraînement réputé. La tragédie ne s’arrête pas là. Le marathonien Samson Kandie a été tué lors d’une agression violente, et un autre marathonien, Willy Kipruto Chelewa, a été retrouvé mort en septembre. Ces tragédies ont secoué la communauté athlétique kényane, déjà fragilisée par une série de décès inexpliqués. Les circonstances de ces événements sont encore sous enquête, et plusieurs suspects ont été arrêtés.

La précarité économique et l’insécurité 

Dans un pays où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, les athlètes sont parfois confrontés à des agressions violentes. Selon Asbel Kiprop, champion olympique du 1500 m en 2008, ces incidents sont en hausse. «Les athlètes doivent être plus vigilants ; trop souvent, ils deviennent des cibles en raison de leurs revenus », a-t-il affirmé. Le cas de Samson Kandie, tué près de sa maison, illustre cette tragédie. Aujourd’hui, Asbel Kiprop, désormais officier de police, estime que les athlètes doivent rejoindre les forces de l’ordre pour assurer leur sécurité, ou du moins, maintenir une discipline stricte.

Lire : Athlétisme : le coureur kenyan Kipyegon Bett est mort

Face à cette succession de tragédies, des voix se sont élevées, comme celle de Julius Yego, médaillé d’argent au javelot aux Jeux olympiques de 2016, qui a appelé à des mesures concrètes pour soutenir les athlètes kényans. «Il est urgent de prendre en compte la santé mentale de ces sportifs, surtout ceux qui ont été suspendus pour dopage ; ils se retrouvent souvent isolés, sans aucun soutien de leurs fédérations ou anciens entraîneurs », a-t-il déclaré.

Notre Afrik avec AFP